Un atelier d’initiation au rap pour se découvrir autrement
Comment amener les élèves à prendre confiance en eux et à libérer leur créativité ? Cette question, inscrite avec force dans le projet éducatif lasallien, a amené une enseignante de français à créer un atelier d’écriture avec la classe de 2de professionnelle des métiers de la relation clients du lycée Saint-Genès La Salle à Bordeaux. Et pourquoi pas associer un rappeur au projet ? C’est l’histoire du désir d’une professeure de français, Ingrid Hoyuela, de faire émerger tout le potentiel de ses élèves. C’est aussi l’histoire d’une rencontre avec Fabien Modolo, alias Keurspi. Depuis de nombreuses années, cet ancien éducateur du collège Saint-Genès La Salle écrit des textes de rap qui prônent l’ouverture d’esprit et le dépassement de soi. Cet artiste de scène propose désormais des ateliers d’initiation au rap dont le double objectif est d’apprécier la dimension esthétique et créative de la parole et de s’exprimer devant un groupe. Théaline, accompagnée de ses camarades de classe, déclame son texte. Se dépasser par la pratique artistique Keurspi a accompagné les élèves de 2de pro, curieux et pleins d’énergie, dans le processus de création avec pédagogie et bienveillance. Une séance sur l’origine du rap, d’autres consacrées à des exercices sur la langue et les sonorités, puis à l’écriture d’un couplet ou à un travail de groupe sur des thèmes qui sont chers aux jeunes comme l’injustice ou la construction de soi : le projet s’insérait dans l’objet d’étude du programme de lettres « Dire et se faire entendre : la parole, le théâtre, l’éloquence ». Malgré des débuts parfois compliqués, une fois que la confiance s’est installée, que les masques sont tombés et que le regard des autres n’a plus été un frein à l’expression, les élèves se sont enfin révélés. Une énergie de groupe s’est créée et de belles surprises ont pu émerger. Les apprentis rappeurs ont ensuite choisi une mélodie parmi celles proposées par Keurspi. Ils ont travaillé sur la mise en voix, la prosodie, le rythme et la diction. Puis le jour de l’enregistrement est arrivé : chaque élève a déclamé son couplet à l’auditorium avec l’aide technique de Pierre Guilon. L’atelier s’est révélé être un formidable exutoire pour certains et un véritable travail sur soi à travers la création artistique pour tous. Violette Fasy-Ráfai Crédit photo : Fabien Azéma
Carnet de voyage du frère supérieur général Armin Luistro et de ses conseillers
Nommé frère supérieur général lors du 46e chapitre des frères de l’Institut en mai 2022, Armin Luistro avait à cœur de faire un tour du monde lasallien et de s’arrêter quelques jours dans le pays du fondateur pour y découvrir les réalités de nos missions et de nos communautés. Le frère Armin, accompagné de l’ensemble de ses conseillers généraux, a découvert dès son arrivée à Paris le programme concocté par le frère Jean-René Gentric. Le visiteur provincial avait particulièrement mis l’accent sur la découverte des œuvres nouvelles, autrement dit des structures éducatives où frères et laïcs répondent quotidiennement à une urgence éducative. Le frère supérieur général Armin Luistro a pris un temps d’échange avec les élèves de l’école Oscar Romero située à Garges-lès-Gonesse. Crédit photo : Lionel Fauthoux 6 mars, jour de grève. Les visiteurs romains embarquent dans une rame bondée de la ligne 13 qui remonte le joli quartier des Invalides dans le 7e arrondissement de Paris jusqu’à la grisaille de Saint-Denis (93) où l’ambiance est paradoxalement plus respirable et enjouée. Quelques kilomètres en voiture et ils arrivent à Garges-lès-Gonesse, où l’établissement Oscar Romero accueille 70 jeunes en décrochage scolaire. Le travail mené par Étienne, Catherine, Sœur Rénia, Marc, Kamel,… est absolument remarquable. Les enjeux ? L’apprentissage de la lecture, de l’écriture, des fondamentaux en mathématiques et l’acquisition d’un minimum de culture générale. Le pari se transforme en réussite pour Maessa, 13 ans, qui ne savait pas lire il y a encore trois ans ou pour Manel, 14 ans, qui aujourd’hui ambitionne de devenir infirmière. La matinée s’achève par un passage aux Doucettes, un quartier qui a fêté ses 50 ans d’existence il y a quelques mois. Le frère Bernard, qui a longtemps œuvré dans ce lieu populaire et cosmopolite situé non loin d’Oscar Romero, le présente à la délégation venue de Rome. Trois sœurs « lasalliennes » de la fraternité Jean-Martin Moyë y jouent depuis plusieurs années un précieux rôle d’animation et d’éducation. Des camping-cars transformés en salles de classe Sur la pause méridienne, direction Viarmes, banlieue du Val d’Oise, à la découverte des camions-école. « Lorsque les enfants ne vont pas à l’école, c’est l’école qui vient à eux », explique-t-on au frère Armin et à ses conseillers. Une douzaine d’écoliers accourent du terrain vague sur lequel sont installées des caravanes. Sophie et Jean-Noël, leurs professeurs, ouvrent les portières coulissantes des deux camping-cars aménagés depuis plus de 30 ans en salles de classe. Lecture, étude des sons, vocabulaire, calcul : il s’agit là de transmettre un savoir pratique pour pouvoir se débrouiller dans la vie. Un long échange entre les frères et le « chef » du campement, le père de l’un des enfants, est l’occasion de mesurer tous les bienfaits du dispositif et la reconnaissance des équipes éducatives. « Créer une classe unique pour notre communauté est une chance pour nos enfants. Elle est le véritable lien social, culturel et fraternel avec le monde extérieur », souligne-t-il. Ce qui a surtout marqué les frères, c’est l’investissement inconditionnel des équipes auprès de l’ensemble de ces jeunes des périphéries. Leur carnet de voyage aurait été incomplet sans les visites du Paris lasallien (lieux où saint Jean-Baptiste de La Salle a étudié et œuvré) et des établissements de la région, mais aussi de l’Hôtel de La Salle à Reims et enfin d’un des établissements lasalliens rémois dans lequel a été enregistré une émission sur la web radio des jeunes RJR (Radio Jeunes Reims). Lionel Fauthoux
Frère Fernand BECRET Les Méditations de Saint Jean-Baptiste de La Salle et l’Éducation
Ce jeudi 8 juin 2023, l’amphithéâtre de la Maison de la Salle a réuni les Frères du Conseil de District, les Délégués de Tutelle, les Délégués de Pôle et quelques amis, autour du Frère Fernand BECRET, venu présenter son travail sur « Les Méditations de Saint Jean-Baptiste de La Salle et l’Éducation ». En préambule, Frère Fernand BECRET a tenu a rappelé ce qu’il a écrit dans « La note préliminaire » de son ouvrage, son travail « n’est pas une publication de vulgarisation. Mais il se veut une plongée dans le texte même du Fondateur, avec ce qu’elle implique d’accueil, de dépaysement et de patience. » Son travail se fonde sur le texte même de Saint Jean-Baptiste de La Salle et non sur la tradition lasallienne depuis ses premiers disciples. « Je suis heureux de remettre cette étude à l’Institut et au réseau La Salle. Si elle pouvait nourrir et inspirer des disciples de notre Fondateur, ce serait bien » c’est par ces premiers mots que le Frère Fernand s’est adressé à son auditoire. Le Frère Fernand nous fait un beau cadeau. « Cadeau utile d’un formateur à de plus jeunes chercheurs et formateurs, travail original et inédit qui va permettre aux lasalliens souvent pressés par d’autres tâches de trouver rapidement de quoi nourrir leur réflexion, leur prière, leurs travaux de recherches et leurs préparations en vue de présenter à d’autres éducateurs le cœur de la pensée lasallienne. » comme le souligne Frère Claude REINHARDT, coordinateur du CORELA (Conseil de Recherche Lasallienne), dans sa préface. Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Ut elit tellus, luctus nec ullamcorper mattis, pulvinar dapibus leo. Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Ut elit tellus, luctus nec ullamcorper mattis, pulvinar dapibus leo.
Extrait du reportage Magazine La Salle liens international juin 2023 Florence Porcel
La pratique du theatre, une tradition dans un certain nombre d’établissementsdu réseau La salle École et théâtre peuvent être antinomiques : quand le second consiste à jouer, la première est faite pour travailler. Mais au sein du réseau La Salle, un certain nombre d’établissements arrivent avec bonheur à concilier les deux. Si toutes les écoles qui proposent une activité théâtre ont comme point commun de l’incorporer parmi le temps scolaire, le choix proposé aux élèves peut être plus élargi. Au collège Saint-Jean La Salle de Guidel en Bretagne, les jeunes peuvent faire du théâtre pendant la pause méridienne avec des cours dispensés par une intervenante extérieure, elle-même comédienne et metteuse en scène. Dans ce même établissement, il existe une option nommée « classe interlangue » où les élèves pratiquent le théâtre dans les trois langues étrangères enseignées dans les classes : l’anglais, l’allemand et l’espagnol. Une enseignante de français, Catherine Favé, a également mis en place une classe théâtre pour ses 6es, afin de dispenser son enseignement autrement – avec une audition à l’entrée. « Il s’agit de déceler une appétence, un talent naturel, ou une forte envie malgré une timidité », précise-t-elle. À Notre-Dame La Salle à Chemillé-en-Anjou dans le Maine-et-Loire, établissement accueillant un collège et un lycée, un atelier théâtre sur la pause méridienne est proposé aux collégiens, une option théâtre intégrée à l’emploi du temps est ouverte à tous les lycéens, et une préparation aux oraux est dispensée aux terminales par une professionnelle parisienne, Sophie Lecarpentier. Cette même intervenante est présente pour une initiation de deux heures dispensée aux enseignants lors de la journée pédagogique de rentrée : « Il est toujours difficile de parler de soi et de se mettre en avant, surtout quand on a 17 ou 18 ans, mais également plus tard. Les professeurs peuvent ainsi l’expérimenter, afin de se représenter quels enjeux et quelles difficultés constitue le Grand oral pour les jeunes », explique Patricia Noël, la cheffe d’établissement. Outre les différentes modalités de la pratique, la politique budgétaire peut être différente d’un établissement à l’autre. Au collège Sainte-Cécile La Salle d’Angers par exemple, l’option est payante : « Il s’agit de 90 euros pour l’année, précise Marie de Saint-Martin, adjointe en pastorale scolaire et référente théâtre. Mais les parents perçoivent bien cette activité, les inscriptions sont toujours nombreuses : 85 élèves en moyenne participent à l’option. » Extrait du reportage Magazine La Salle liens international juin 2023 Florence Porcel – Laurence Pollet – Lionel Fauthoux Le théâtre, une option très prisée Partout, les demandes affluent et l’option théâtre est parmi les plus prisées par les élèves de tout niveau. « Elle fait partie des moyens qui permettent aux enfants de s’épanouir et les parents sont sensibles à cet aspect. Cela fait partie du projet d’établissement », confie Mélanie Duffy, directrice de l’école maternelle et élémentaire Saint-Joseph-La-Salle de Dijon en Côte d’Or. Dans un milieu rural comme Chemillé-en-Anjou, l’arrivée de la pratique théâtrale a été un changement plus que positif, à la fois pour l’établissement et pour le tissu social au niveau local : « C’est une acculturation qui se fait dans un milieu qui n’y était pas habitué. En deux ans, le nombre d’élèves inscrits a doublé, voire triplé, constate Patricia Noël. Le succès est croissant et l’obtention d’une option officielle a été validée par les instances académiques, sans compter que la direction diocésaine m’a aussi demandé de partager mon expérience avec les collègues chefs d’établissement. » Le théâtre fait même partie des critères de sélection pour le choix d’une école. À Guidel par exemple, nombre d’élèves ont quitté l’enseignement public pour Saint-Jean La Salle exclusivement pour cette option. « Certains ne viennent que pour la comédie musicale », constate également Grégory Léonard, chef d’établissement du lycée Sacré-Cœur La Salle d’Angers. Car outre l’option théâtre classique, cet établissement a une particularité : celle de produire chaque année une comédie musicale. La comédie musicale du lycée Sacré-Cœur : une véritable institution « L’année prochaine, ce sera la cinquantième ! », s’émerveille Jade, élève de terminale. Elle a de quoi en être heureuse : sans cette option, la jeune fille ne serait peut-être jamais venue au monde. « Mes parents étaient dans ce lycée et ils se sont rencontrés à la comédie musicale. C’était donc symbolique pour moi », explique-t-elle. Ce qui était au départ une activité « pour occuper les internes », comme le précise Dominique Roux, une CPE à la retraite qui s’est occupée de cette option entre 1996 et 2018, est devenu la fierté de ce lycée. Les enseignants réussissent l’exploit, chaque année, de monter un spectacle avec un orchestre, des chanteurs, des danseurs et des comédiens avec seulement deux heures hebdomadaires dédiées à cette activité de septembre à décembre, pour des représentations qui ont lieu en janvier – ce qui permet de libérer l’emploi du temps des terminales pour qu’ils se concentrent sur leurs examens pendant les deuxième et troisième trimestres. Exploit qui peut même être qualifié de performance pour Laura Sandrier, la professeure de musique, qui non contente de faire répéter l’orchestre, s’occupe également d’adapter les partitions des chansons pour des instruments qui ne sont pas forcément les mêmes d’une année sur l’autre. Pour aider l’équipe pédagogique, deux à trois chorégraphes les accompagnent en tant qu’intervenantes extérieures. « On prenait les élèves pour ce qu’ils étaient et c’était toujours une bonne surprise », témoigne Dominique Roux. Elle est la seule, cependant, à constater une baisse d’effectifs : « La préparation de la comédie musicale implique de rester dans l’établissement alors que les autres sont dehors, et c’est un frein pour certains. » Mais pour les élèves qui acceptent l’investissement que demande une telle activité, les bénéfices sont là : « Je suis plutôt quelqu’un de timide qui n’aime pas trop parler en public, et ce qui est bien, c’est que sur scène je me lâche complètement : je n’ai pas l’impression d’être moi-même, vu que je joue un rôle ! », analyse Julie, élève de terminale. Le théâtre comme facteur de réussite Que ce soit à Angers avec la comédie musicale ou dans les autres établissements avec différentes options théâtre, les retours sont toujours les mêmes : « Ce qui me marque
Carnet de voyage – jour 3 – 6 mars 2023
Ces périphéries qui nous tiennent tellement à coeur ! Ile de France, retour à la case départ pour le frère supérieur général Armin Luistro et l’ensemble de ses conseillers généraux revenus ces derniers jours d’Egypte et de Roumanie. Ce périple de 2 semaines en Europe permet aux frères romains de se saisir des principales actions éducatives et humaines qui se vivent auprès des jeunes. Ce lundi 6 mars en est une belle démonstration avec la visite de « l’œuvre nouvelle » Oscar Roméro situé à Garges lès Gonesse qui accueille 70 jeunes en décrochage scolaire. Le travail mené par Etienne, Catherine, Sœur Rénia, Marc, Kamel… est absolument remarquable. Les enjeux ? apprentissage de la lecture, de l’écriture, des rudiments en mathématiques ou encore un minima de culture générale. Le pari se transforme pour Maessa 13 ans qui ne savait pas lire il y a encore 3 ans ou Manel 14 ans qui aujourd’hui ambitionne d’être infirmière, sans oublier Sekou 14 ans qui voue une passion pour les animaux La matinée s’est terminée par un passage dans le quartier des Doucettes qui a fêté ses 50 ans d’existence il y a quelques mois ! Quartier populaire non loin d’Oscar dépeint par le frère Bernard où la présence de sœurs « lasalliennes » jouent un rôle d’animation de quartier, l’ensemble initié par le frère Nicolas Capelle il y a quelques décennies. Direction Viarmes banlieue du Val d’Oise sur la pause méridienne à la découverte des camions écoles. Lorsque les enfants ne vont pas à l’école, c’est donc l’école qui vient à eux. Une douzaine d’enfants accourent du terrain vague sur lequel est installé une vingtaine de caravanes. Sophie et Jean-Noël, leurs professeurs ouvrent les portières des deux camping-cars aménagés depuis plus de 30 ans en salle de classe. Lecture, étude des sons, vocabulaire, calcul il s’agit là de transmettre un savoir pratique pour, au moins, se débrouiller dans la vie. Un long échange entre les frères et le « chef » du campement (père de l’un des enfants) a été l’occasion de mesurer tous les bienfaits du dispositif et la reconnaissance des équipes éducatives. « Créer une classe unique pour notre communauté est une chance pour nos enfants, elle est le véritable lien social, culturel et fraternel avec le monde extérieur ». Les frères Armin, Joël, Ricky et Sergio ont été subjugués par l’investissement des équipes auprès de l’ensemble de ses jeunes des périphéries. CARNET DE VOYAGE JOUR 2 Aujourd’hui, 28 février, c’est au tour de l’ensemble scolaire de La Salle de Reims d’accueillir le Frère Armin Luistro supérieur général toujours accompagné de son Conseil Général mais aussi du Frère Provincial Jean-René Gentric et son délégué de Tutelle Christophe Vaissière. Un programme chargé qui a débuté par une visite guidée de l’hôtel de La Salle et de la cathédrale de Reims. Nos frères rémois, présents au quotidien dans l’établissement, ont eu le plaisir d’organiser ce rendez-vous. Belle opportunité pour notre Frère supérieur Armin Luistro de voir et de ressentir les choses et les héritages dans l’endroit même où saint Jean-Baptiste de La Salle a ouvert les yeux sur la pauvreté et le besoin d’apporter son aide aux plus démunis. L’après-midi, le supérieur général et les membres du Conseil Général ont visité les studios de RJR – Radio Jeunes Reims. Ils se sont prêtés à l’exercice de l’interview (qui sera diffusée en FM et en podcast dans les prochains jours). La visite s’est poursuivie par une rencontre avec nos jeunes du CVL. Les lycéens ont pu exprimer leur attachement à l’établissement et aux valeurs de l’identité lasallienne. Privilège pour ces lycéens et particulièrement les 1ères Pro en maintenance véhicule qui ont pu expliquer leur travail et leur projet professionnel lors de la visite des locaux au centre technique. La journée s’est achevée par la rencontre de l’archevêque de Reims au monastère des bénédictines de Saint-Thierry. Des échanges fraternels qui ont permis aux religieux de poser un regard d’espérance sur chacun des jeunes de notre société. Sur ces propos Trois défis éducatifs ont été évoqués par Mgr de Moulins-Beaufort. Défi de l’éducation : dans un contexte de plus en plus matérialiste et virtuel, nous avons constaté que les jeunes aspirent malgré tout à des moments d’intériorité. Hormis l’Ecole, peu de lieux permettent ces écoutes, ces paroles libérées, cette pudeur à dépasser. Il y a de véritables enjeux pour les éducateurs que nous sommes d’intensifier cette « pastorale du seuil ». Défi de la transmission de la foi : dans un monde multiculturel et déchristianisé Comment préparer à la rencontre avec le Christ ? Dans un contexte où les jeunes croyants oscillent entre conviction forte et radicalisation. Défi de la fragilisation des familles qui rend les enfants très inégaux quant à leurs besoins éducatifs. Les écoles catholiques savent et doivent répondre, à leur mesure à ces défis. La DÉMARCHE synodale actuelle rappelle la dignité et la liberté de chaque baptisé mais aussi sa responsabilité d’agir au mieux pour le bien commun, notamment dans l’éducation. Voici les grands défis de notre temps relevés avec conviction par la famille lasallienne. CARNET DE VOAYEG JOUR 1 – 27 FEVRIER 23 Après un temps spirituel en début de matinée, le frère supérieur général Armin Luistro et son conseil ont rencontré le frère visiteur provincial Jean-René Gentric, ses deux auxiliaires, les frères Nicolas Capelle et Paul Cornec, ainsi que son adjoint laïc, Jean-Marie Ballenghien. L’objectif de cette entrevue était d’évoquer les questions propres au district de France et d’Europe francophone. La matinée s’est terminée par une rencontre entre les frères venus de Rome, les frères et les salariés de la Maison de La Salle autour d’un verre. « J’ai beaucoup de choses à apprendre de vous, frères et laïcs de France, a souligné le frère Armin. Des choses à diffuser dans l’Institut. » Chacun a alors pris part à des discussions mêlant le français, l’anglais et l’espagnol. Des échanges à bâtons rompus qui ont permis à chacun de faire connaissance. L’après-midi, la délégation romaine a découvert le Paris lasallien. Guidés par le frère
Collège sainte-Marie La Salle à Roubaix, un pahre dans le Babel
« SI JE LES PERDS, JE NE SAIS PAS OÙ ILS VONT ! » Michel Furnari, professeur en SEGPA. C’est sur ce cri d’alarme que je fais la connaissance de Farida Zouggagh, ancienne élève, et aujourd’hui adjointe de direction au collège La Salle Sainte-Marie de Roubaix.420 jeunes âgés de 11 à 16 ans, 92% de familles boursières, une trentaine de nationalités au cœur d’une ville où la concentration de la richesse autour du parc Barbieux induit sur un autre versant de la ville une ghettoïsation de la pauvreté. Les jeunes n’ont qu’une rue à traverser pour se réfugier sous les ailes des équipes Sainte-Marie La Salle. Mais entre la cage d’escalier et le portail du collège, le trajet rime avec danger. Enrôlements en tout genre, violence, drogue, harcèlement sont dans la rue. Et c’est uniquement lorsque Saïd et Sofia (1) arrivent dans la cour que leur regard s’illumine. Le jeune garçon m’interpelle : « Ici, Monsieur, les professeurs ont le S. » J’ai beau réfléchir et reprendre le lexique de mes propres adolescents, je ne comprends pas. Ils m’éclairent : « Oui le S, c’est-à-dire le sang. C’est la vie, c’est l’amour qui coule dans les veines. Il se passe quelque chose ici et cela fait du bien ! » Pour Zine Chenafi, professeur de mathématiques en classe de 4ème, la mission est salutaire à Sainte-Marie. « On sauve les enfants de la délinquance. Il n’est pas rare de reprendre les fondamentaux autour de l’hygiène ou de la politesse en plein milieu de la résolution d’une équation du premier degré. Ma plus grande satisfaction, c’est de constater l’évolution de nos élèves au fil des mois. Je retrouve même, des années après, nos anciens qui, pour certains, font de brillantes carrières dans le médical, le juridique ou l’artisanat. » Zine exerce à Sainte-Marie depuis 2015. Il porte un regard d’espérance inusable sur chacun de ces enfants venus de Syrie, d’Algérie, du Maroc, de France et d’autres terres encore. Il martèle sans cesse que ce vivre-ensemble n’est possible que parce qu’il y a un esprit fraternel. Mieux encore, une pastorale du seuil qui vient naturellement désamorcer les tensions. « Les familles nous font confiance. Elles savent que nous éduquons leurs enfants dans les valeurs d’un Dieu universel et que nous les instruisons selon les intuitions de saint Jean-Baptiste de La Salle pour les amener vers un monde meilleur. »Farida m’explique que certains enfants se lèvent seuls, sans faire de bruit, et arrivent le ventre vide au petit matin. C’est au détour d’une conversation que l’adjointe de direction apprend que le papa de Sarah est en prison et qu’il lui manque terriblement.Je ne sais plus si la buée de ses lunettes est la conséquence d’un trop-plein d’émotions dans le vide existentiel de ces enfants ou de l’impatience d’avaler un café brûlant. Elle se ressaisit dans un joli lapsus : « Ici je m’épanourris ! » C’est le plus beau néologisme que j’ai pu entendre de la bouche d’un éducateur tout à sa vocation. Pour Tarak Majouli, responsable de niveau des 3èmes et enseignant depuis 2005, « les élèves ont besoin d’un exemple ». Et derrière l’exemplarité, il y a la justice. Le Parcours d’Education à la Justice (PEJ) développé par le pôle animation formation du réseau national et déployé par les équipes pédagogiques de Roubaix est un véritable guide dans l’accompagnement des jeunes collégiens du quartier. Il s’agit de convertir des valeurs telles que le courage, le pardon, la liberté, la responsabilité,… en vertus. Autrement dit, que ces notions deviennent au fil des mois de véritables traits de caractère chez nos jeunes.Tarak insiste sur le sens donné à la mission : « Nous ne sommes pas là uniquement pour transmettre un savoir. Par ces chemins sinueux des apprentissages de la vie, nous donnons du sens à notre métier d’éducateur. »Changement de décor. Après les classes dites traditionnelles, me voilà devant la porte mystérieuse de Michel Furnari, responsable de la classe SEGPA et professeur d’atelier. Ce quadra aux allures de Billy Gibbons, le chanteur de ZZ Top, est un ancien compagnon du devoir qui met à profit ses talents auprès de nos ados. Le travail du bois, la marqueterie, la sculpture, l’électricité, la petite maçonnerie, l’informatique, tout ce qui se démonte, se transforme ou se recycle, c’est pour Michel et il sait embarquer dans son arche l’ensemble de ses jeunes sur des créations à couper le souffle. De l’utile à l’art déco, il éduque et façonne les mains des adolescents dans la précision du geste et la recherche esthétique de la pièce finale. Véritable laboratoire d’expériences, son atelier est une fenêtre ouverte sur la beauté du monde.Mouloud Berbache s’invite dans la conversation. Ce directeur de SEGPA joliment cravaté m’interpelle : « Le secret pour ces enfants, c’est d’être tout le temps présent pour eux. » Les équipes se réunissent ainsi deux heures par semaine pour échanger sur chacun des enfants de la SEGPA et du collège. Ces mini-conseils de classe permettent d’aborder la pédagogie mais aussi la vie dans l’établissement. Mouloud insiste sur la construction de l’homme, il est convaincu par une pastorale vécue transversalement sur le site. Vient enfin le moment de retrouver le chef d’établissement. Après une expérience réussie de directeur adjoint à Saint-Adrien La Salle de Villeneuve-d’Ascq (59), Benoît Lagniez a pris la direction du collège en septembre 2020. « Il n’est jamais question de prendre possession d’un lieu, mais toujours d’intégrer avec confiance une équipe solide et professionnelle. Mon rôle est d’insuffler un nouvel élan à Sainte-Marie. »Benoît est sur tous les fronts. En quelques mois il a su consolider les liens avec la mairie, les associations et les partenaires locaux qui ont saisi depuis des années les enjeux de ce collège implanté au cœur des quartiers populaires de Roubaix. Le chef d’établissement veut aller plus loin, en hissant le collège dans ses résultats.Ritualiser une journée, c’est proposer un cadre rassurant, une cadence dans l’organisation du travail. Il est tout aussi essentiel de sacraliser la classe ; cela passe
Olympe rayonne dans l’ombre de la Providence
Il est des lieux où le précepte de Jean-Baptiste de La Salle, « Avec et pour le jeune », s’incarne à la perfection. Au collège la Providence de Poitiers, les équipes pédagogiques travaillent main dans la main avec Émilie, la maman d’Olympe atteinte de la maladie de la lune, pour lui offrir une scolarité ordinaire en toute sécurité. Dans les écrits sombres et froids d’antan, les malades atteints de xeroderma pigmentosum étaient voués à rester cloîtrer chez eux. Exposés aux rayons du soleil, ne serait-ce que quelques minutes, ils risquaient d’irreversibles lésions de la peau, voire des cancers. Une situation qui impliquait de grandes difficultés pour la scolarisation des enfants ou le maintien du lien social, et une adaptabilité extrêmement contraignante pour la famille. Puis, il y a Olympe, jeune fille pétillante de 13 ans qui file dare-dare au collège à vélo, absorbe inlassablement les programmes d’enseignement, chante avec bonheur au sein du groupe vocal de sa classe de 4e, enchaîne avec une séance shopping en compagnie de sa maman et ses amies dans le cœur de Poitiers et se réfugie enfin, le temps d’un weekend ou des vacances, chez ses grands-parents dans le Cotentin où elle retrouve sa famille et son poney. Olympe fait partie des 92 « enfants de la lune » diagnostiqués en France. Doux euphémisme pour expliquer qu’une place au soleil est inenvisageable pour la collégienne. Elle ne se sépare jamais de son dosimètre qu’elle tient dans sa main gantée. L’appareil permet de mesurer le taux des UV : il ne doit absolument pas décoller du 0 pour qu’Olympe puisse retirer en toute sécurité sa bulle protectrice semblable au casque des sorties orbitales d’un certain… Thomas Pesquet. Un impératif pour l’établissement : protéger Olympe de toute exposition aux UV L’adolescente incarne une joie de vivre insufflée par l’optimisme sans faille d’Émilie, sa maman, et relayée par les équipes pédagogiques de l’établissement lasallien la Providence à Poitiers. Joli challenge d’inclusion à relever pour le chef d’établissement de l’époque François-Xavier Willing qui a reçu Olympe dans son bureau pour son inscription il y a trois ans . Point de discussion autour de ses notes et des appréciations. Le comportement d’Olympe est comme son travail : exemplaire. En revanche, le cahier des charges pour son accueil était tout autre. Il fallait impérativement procéder à la mise en place de quelques équipements pour que la jeune fille puisse se déplacer dans l’enceinte du collège en toute sérénité. Le moindre rayon UV déposé sur sa peau est fatal. Le travail en étroite collaboration avec la collectivité territoriale et le département a permis de financer les films protecteurs à apposer sur les vitres de l’établissement, d’enfiler des « chaussettes » filtrantes sur chacun des néons et de remplacer petit à petit chaque filament de tungstène par des leds. La classe attitrée de la collégienne, le laboratoire, le gymnase et la cantine sont des lieux dorénavant protégés. Reste quelques couloirs de passage et certaines salles qui n’ont à ce jour pas été équipés. Mais peu importe : Émilie a suggéré la pose de petites émoticônes représentant un soleil en colère et une lune apaisée pour interpeller sa fille d’un éventuel danger.Olympe vit donc ses années collège comme l’ensemble des 600 jeunes de l’établissement, en toute autonomie. Les équipes éducatives pilotées par la cheffe d’établissement Hélène Soulard se sont engagées dans l’accompagnement de la scolarité d’Olympe. Une fois de plus, la promesse d’une école excellente est la réussite du plus fragile.
Dossier : J’ai choisi d’enseigner
Plongée dans la communauté éducative du collège rural La Salle Notre-Dame de Monbahus. Qu’ils soient professeurs depuis toujours ou en reconversion dans le métier, les enseignants de ce collège du Lot-et-Garonne conjuguent au quotidien inventivité et attention à l’autre. Avec enthousiasme, sensibilité et passion. Ne cherchez pas de paillettes dans les bâtiments gris aux volets verts du collège de Monbahus, petit village du Lot-et-Garonne (47). Ici, faute de moyens, pas d’esbroufe, pas de salle informatique flambant neuve ou de tableaux blancs interactifs. Le collège de ce village rural de 600 habitants du sud-ouest de la France est discrètement situé en face de l’église, à quelques mètres de la petite supérette du coin. C’est là que les 12 élèves du dispositif ULIS (Unités localisées pour l’inclusion scolaire) viennent apprendre à compter la monnaie en achetant de la farine et des œufs qu’ils transformeront ensuite en crêpes ou en tartes aux pommes. Entre deux coups de fouet, ils redécouvrent la proportionnalité ou les nombres décimaux. « On est dans le pratique, dans le concret, confie Sylvie Barraud, enseignante spécialisée en ULIS. On fait en sorte qu’ils quittent le collège les moins fragiles possibles, qu’ils deviennent des jeunes adultes capables de se débrouiller. Enseigner, c’est un métier où l’on se met au service des enfants. » PEU DE MOYENS, MAIS DES IDÉES PÉDAGOGIQUES PLEIN LA TÊTE Pour stocker les nombreux jeux qui l’aident à développer les apprentissages de ses élèves en inclusion, Sylvie Barraud, « prof de tout » précise-t-elle, offre régulièrement à sa classe des rochers au chocolat, par boîte de 16. « Les boîtes en plastique transparent de cette marque sont hyper pratiques pour nos activités, explique l’enseignante de ce collège aux petits moyens. Alors on mange du chocolat ! »Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Ut elit tellus, luctus nec ullamcorper mattis, pulvinar dapibus leo.Ici, c’est le système D et l’entraide qui animent l’équipe pédagogique. Et ça marche : les paillettes, c’est dans les yeux des élèves qu’on les retrouve. « Avec trois bouts de ficelle, on fait des feux d’artifice », confirme la cheffe d’établissement, Myriam Grossias. À 43 ans, c’est elle qui anime depuis deux ans et demi l’équipe du collège La Salle Notre-Dame de Monbahus, douze professeurs magiciens de l’éducation. Le slogan de l’établissement résume à lui seul l’ADN de La Salle Notre-Dame : « Loin des villes, près des élèves ».Sur les 96 enfants répartis dans les quatre classes de 6e, 5e, 4e et 3e, une vingtaine occupe l’internat. « Certains viennent d’Agen, à 60 kilomètres d’ici, précise Myriam Grossias. C’est un établissement familial. Nos élèves peuvent avoir des difficultés, ce n’est pas l’élite, mais c’est bien de s’occuper d’eux. Et on est hyper innovants en pédagogie car il ne faut pas de sous pour ça. Juste des idées. » POUR CERTAINS, LE PROFESSORAT MARQUE LE DÉBUT D’UNE DEUXIÈME CARRIÈRE Extrêmement soudée, l’équipe enseignante est animée par une véritable soif de transmettre dans la joie aux jeunes générations. Plusieurs sont devenus profs après une autre carrière, comme Audrey Aumailley, professeur de lettres. Voilà 12 ans qu’elle a quitté le secteur touristique et la formation pour adultes pour enseigner, « riche de toutes ses expériences professionnelles passées ». À 45 ans, elle a fait le choix d’embrasser la carrière d’enseignante et c’est aujourd’hui pour elle devenu « une vocation » et une passion. « Je ne me lève pas le matin pour aller travailler : je vis l’enseignement, confie-t-elle. C’est pour moi le plus beau métier du monde. L’humain est au cœur de notre mission. »Ce matin-là, elle invite, comme chaque semaine, deux élèves de 4e à présenter à leurs camarades leur revue de presse. Debout devant le tableau, masque sur la bouche, Christelle a choisi de parler de la fonte de la calotte glaciaire au Groenland, « parce qu’on ne parle pas assez de la nature, explique l’adolescente. On parle plus de politique ou du covid. Or, il s’agit de notre futur. Et ça va faire des dégâts ». À Monbahus, beaucoup d’élèves sont fils ou filles d’agriculteurs mais aussi d’employés ou d’artisans. Maëlys, interne âgée de 13 ans, hésite entre devenir infirmière libérale ou policière scientifique. Mathéo, 14 ans, veut être conducteur d’engins agricoles. Il a hâte d’entrer au lycée agricole mais, en attendant, il est collé ce soir, jusqu’à 19h30. « On a une sorte de permis à points et là, j’en ai perdu dix parce que les cours, c’est pas mon truc. » Par contre, lui comme Maëlys et leurs camarades, sont unanimes : « Il est bien notre collège car c’est petit et familial et les profs sont toujours à l’écoute ». PROF D’EPS, JARDINIER-APICULTEUR ET BOOSTER D’AMBITION Le mercredi après-midi, les internes enchaînent les activités peinture, escalade, trampoline ou muscu dans la salle du bas avec leur professeur de sport. « Avec lui, on s’occupe des arbres fruitiers aussi, dit Maëlys. Et on a des ruches, on fait du miel et des bougies. » Trois ruches sont en effet situées en contrebas, sur un terrain pentu où Christophe Callegrain, le professeur d’EPS, a également aménagé avec les élèves un potager et planté 120 arbres fruitiers ainsi que 250 plantes mellifères pour faire vrombir de plaisir les abeilles. Passionné « par le bio et le naturel », Christophe Callegrain est un prof heureux. « L’idée que c’était mieux avant, c’est faux. La jeunesse est pleine d’espoir, dit l’ancien gymnaste de haut niveau. Je dis aux gamins de ne pas s’interdire de rêver. En France, il y a des passerelles partout. » Lui est presque devenu un modèle pour les élèves en difficulté. « J’étais un enfant avec la tête pleine d’eau. Je n’avais aucun intérêt pour l’école. » Fils d’un plâtrier et d’une secrétaire, il se lance à l’époque dans un BEP agricole mais le sport a toujours été sa passion. Alors il rattrape son retard scolaire pour préparer le CAPES en 1996. « Je suis devenu paraplégique après un accident de moto, confie-t-il. Il m’a fallu un an et demi de greffes et
Lourdes, se connaître pour se reconnaître
C’est sur cette thématique que 1200 jeunes collégiens de la délégation du Sud-Ouest se sont retrouvés lors d’une magnifique journée ensoleillée au sanctuaire de Lourdes le 6 avril dernier. Le rendez-vous impulsé par le délégué de tutelle de la région Jean Bourrousse a nécessité une année de préparation pour imaginer et construire l’événement réunissant une douzaine d’établissements scolaires allant de Bayonne à Poitiers. Adjoints en pastorale, professeurs, éducateurs et chefs d’établissement se sont mis au diapason, en étroite collaboration avec 80 jeunes lasalliens sollicités pour l’encadrement. Arrivés la veille de Bordeaux, Pont-l’Abbé-d’Arnoult et Bois, nos jeunes volontaires se sont accordés pour l’organisation logistique. De la planification des activités en passant par la gestion des ballets de bus, la distribution des repas, les temps d’échanges avec les frères, la célébration et les chants, rien n’a été laissé au hasard pour relever le défi et garantir le succès de ce temps fort. Pour Gabrielle, élève de terminale à Saint-Genès La Salle de Bordeaux : « ÊTRE LASALLIEN N’EST PAS UNIQUEMENT ÊTRE ISSU D’UNE ÉCOLE LOGOTÉE DE SON ÉTOILE. C’EST AVANT TOUT AVOIR LA FOI, AUTREMENT DIT AVOIR LA CONFIANCE EN SOI ET EN L’AUTRE. UNE FOI EN CES PETITES ACTIONS DU QUOTIDIEN QUI PERMETTRONT DE CHANGER LE MONDE. » Et ce millier de jeunes peut se targuer d’avoir changé le monde en cette veille d’anniversaire de saint Jean-Baptiste de La Salle. Se connaître, aller puiser au fond de son cœur la lumière jaillissante et abondante de la vie. Ce chemin, si difficile à trouver parfois nous a été tracé par des témoignages de frères des Écoles chrétiennes venus de toute la France mais aussi des Philippines et du Burkina Faso. La centaine d’adultes responsables de tous ces enfants ont aussi vécu non sans émotion les parcours des religieux. 12h30, la photo de groupe est programmée. Les lasalliens se sont dirigés devant la basilique Notre-Dame du Rosaire de la cité mariale. Et c’est au même moment, telle une apparition, que la conférence des évêques de France en assemblée plénière est sortie de ce haut lieu de convergence des processions. Les jeunes se sont écartés et ont réalisé naturellement une immense haie d’honneur aux prélats. « Rien n’était programmé de la sorte mais la rencontre devait se faire », constate Jean Bourrousse d’un large sourire. Entre étonnement et admiration des jeunes voyant les religieux se fondre parmi eux, la parole s’est joliment libérée. Chasubles roses des religieux confondues aux casquettes aux couleurs de l’étoile lasallienne des enfants, l’esplanade s’est colorée de vie et de lumière en quelques secondes. C’est dans la basilique Saint-Pie X de Lourdes que Monseigneur Wintzer, évêque de Poitiers, a clôturé le rassemblement des jeunes. Cette basilique souterraine plonge ses pèlerins dans l’obscurité. Sollicité continuellement par les éblouissements de notre société, il était bon de vivre l’expérience tamisée pour aller chercher au fond de soi la lumière intérieure, la lumière de son cœur. Un message bien reçu par l’ensemble des enfants.
Accueillir et être accueilli
« L’accueil de tous ». L’accroche se retrouve dans la majorité de nos plaquettes de communication. Mais quel sens donner à ce mot ? Comment l’accueil prend-il corps dans les établissements lasalliens ? Qu’est-ce qu’un accueil réussi ? Nous sommes allés à la rencontre de Nadine Zamith, cheffe d’établissement de l’ensemble scolaire Saint-Germain de Charonne La Salle à Paris, pour répondre à toutes ces questions. L’ensemble scolaire, situé dans une zone REP (Réseau d’éducation prioritaire) du 20e arrondissement de Paris, surplombe le quartier et nous regarde de haut dès notre arrivée. Derrière les grandes lignes verticales d’acier trempé qui composent l’immense portail, on peut entendre les cris de joie des élèves de l’école. Une fois le portail franchi, nous sommes immédiatement plongés dans les jeux de marelle et de billes qui rappellent l’école d’antan. Au mur, des dessins colorés d’enfants. Dans l’espace du collège est affichée la une du journal Charonnews. Il s’agit des dernières actualités rédigées par des élèves accompagnés de professeurs dans le cadre d’un atelier. Un peu plus loin, une webradio résonne avec des sujets variés et contemporains, et nous rappelle que nous sommes bien au XXIe siècle ! Nous apprendrons par la suite que ces ateliers du collège sont portés par les professeurs dans le cadre du projet d’établissement pour permettre de développer le discernement et l’esprit critique, et donc, de maîtriser l’information face à l’omniprésence des réseaux sociaux et des fake news. « « ACCUEILLIR, C’EST FAIRE UNE PLACE POUR GRANDIR ET S’ÉPANOUIR EN LIEN AVEC LES AUTRES »» Chaque famille qui souhaite inscrire son enfant passe par la rencontre avec la directrice pour un entretien d’une heure. En effet, pour Nadine Zamith, « il est fondamental que chacun trouve sa place et puisse se construire et s’épanouir en lien avec les autres », et en premier lieu laisser à chacun sa liberté : « Je n’ai jamais inscrit un enfant qui ne voulait pas venir à Charonne ». L’établissement qui accueille la multiculturalité induit le discernement sur le vivre ensemble, ou plutôt le vivre en partage et en fraternité, avec pour dénominateur commun l’adhésion au projet éducatif lasallien et aux valeurs qui le composent. Un œil bienveillant posé sur chaque enfant Un œil bienveillant posé sur chaque enfantL’accueil prend différentes formes et il est partout à Saint-Germain de Charonne : de la salle des professeurs qui échangent autour d’un café au bureau de la direction, de la cour de récréation aux salles de classe en passant par l’entrée. Il présuppose la liberté. « L’école est un lieu où l’on apprend à être en lien, à faire ensemble, à se construire en harmonie. » Une classe d’allophones où se conjuguent les verbes « recevoir » et « donner » C’est dans cet esprit que l’établissement lasallien accueille aussi, depuis deux ans, la classe Nelson Mandela ouverte à des mineurs non accompagnés. Les fondamentaux tels que la lecture et l’écriture, les mathématiques et l’anglais sont acquis en petits groupes de 5-6 jeunes. En revanche, pour ce qui est des arts plastiques, de l’éducation physique ou musicale par exemple, les allophones vivent l’immersion en classe ordinaire ; c’est ce qui fait l’enrichissement du groupe et permet de construire des liens.La cheffe d’établissement nous rappelle que le mot « hôte » comporte un double sens : l’hôte est à la fois celui qui accueille et celui à qui l’on donne l’hospitalité. Ce qui implique l’échange, voire la réciprocité. Un même mot pour évoquer deux idées. Accueillir, c’est aller vers l’autre et recevoir de lui, c’est donner et s’enrichir. Comment accueillir pour donner confiance dans l’avenir ? Fawa est une jeune ivoirienne de 17 ans. Elle fait partie de la classe Nelson Mandela. Arrivée à la gare du Nord en plein hiver 2021, transie de froid, elle a découvert après un périple de plusieurs milliers de kilomètres, l’accueil par la couverture chaude dont un membre de la Croix Rouge l’a enveloppée. Une douche, un repas, le minimum pour recevoir la première attention, le premier signe d’affection.Au bout de quelques mois, Fawa a retrouvé l’esquisse d’un sourire en s’installant sur le banc de l’école du quartier parisien. Elle est, pour la première fois de sa vie, attendue. Extrêmement reconnaissante de cette main tendue, de cette confiance témoignée, Fawa travaille avec opiniâtreté et rattrape petit à petit le niveau. « Par l’accueil, par la disponibilité de mes amis, de mes professeurs, j’ai aujourd’hui un projet et une ambition », nous explique celle qui rêve de devenir esthéticienne. « C’est l’une des élèves les plus impliquées de la classe», nous confie Véronique Goudale, sa professeure de français. La preuve : l’enseignante a embarqué son groupe au théâtre du Châtelet pour découvrir l’odyssée africaine Le vol du Boli et le lendemain, Fawa s’est fait une joie de traduire la culture animiste bambara d’Afrique subsaharienne en français. Rien de tel pour prendre confiance en soi et ouvrir ses camarades à ses origines. Soigner les maux par les mots Sylvain, lui aussi élève de la classe Nelson Mandela, a vécu des épisodes extrêmement douloureux dans sa vie, enfouis en son for intérieur. Lors de la journée de la fraternité 2021, il a enfin eu la possibilité de crier sa rage grâce à une chanson qu’il avait été invité à présenter dans le cadre d’un temps fort de fraternité au sein de l’établissement. Son texte violent, avec des mots difficiles à entendre par tous les élèves, plaçait les équipes éducatives devant un sacré dilemme. Comment ne pas censurer le message de Sylvain issu de sa terrible expérience de la migration et de la misère ? La cheffe d’établissement a alors proposé à Sylvain de conserver son texte mais de l’écrire en soninké, sa langue maternelle. Les maux se sont exprimés, à travers le texte de sa chanson. Sylvain est aujourd’hui devenu la star de sa promotion. L’accueil, c’est aussi la leçon du renard au Petit Prince « Il faut d’abord apprivoiser ces jeunes. Cela peut prendre des semaines », confie Véronique Goudale, rappelant cette réflexion du renard au Petit Prince dans le livre de Saint-Exupéry : « Si tu m’apprivoises, nous