« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ! »
par Lionel Fauthoux
Cette phrase prononcée par Jacques Chirac lors du 4e Sommet de la terre à Johannesburg date de septembre 2002, et elle résonne encore et toujours dans nos têtes. Vingt ans après, où en sommes-nous sur l’engagement de nos établissements scolaires dans l’écologie intégrale et le développement durable ? Tel fut le thème de notre Université lasallienne d’automne (ULA) qui s’est déroulée du 21 au 23 octobre 2022 à Issy-les-Moulineaux et qui a réuni une centaine d’acteurs du réseau d’éducation La Salle.
Plus d’un enfant sur 100 est scolarisé dans le réseau des établissements La Salle en France. La résilience est donc possible en sensibilisant nos éducateurs à l’éducation intégrale de nos jeunes pour une écologie intégrale. Aux dimensions personnelle, spirituelle et sociale développées par le philosophe Jacques Maritain en 1943, s’est ajoutée la dimension naturelle du bien commun. L’objectif, selon Pascal Balmand, le premier intervenant de l’ULA, est de s’intéresser à l’enfant dans sa globalité et pas seulement à l’élève : « La personne constitue un tout systémique : corps, cœur, esprit, âme, et ne se réalise que dans la relation à autrui. Un lien organique entre accomplissement de la personne et construction du bien commun. »
Alors, est-il trop tard pour agir ?
Geoffroy Belhenniche, directeur du développement durable au sein du campus UniLaSalle de Rennes, a emboîté le pas au responsable de la transition écologique de la Conférence des évêques de France. « Il n’est pas trop tard pour agir. En revanche, il est urgent d’agir », a-t-il précisé. En effet, si nous devons respecter les accords de Paris adoptés lors de la COP21, nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre à deuxtonnes de CO2 par an et par habitant. Pour repère, l’empreinte carbone d’un Français est aujourd’hui de 10 tonnes et de 16 tonnes pour un Américain. Décroître pour recroître. Il est également question de génération frugale : pour Geoffroy Belhenniche, les impératifs de la neutralité carbone passent par la baisse des mobilités, les limitations des constructions nouvelles et l’économie circulaire. Autrement dit, la complexité réside entre le plancher social, c’est-à-dire l’accès à l’eau, à l’alimentation, aux services de santé, au logement, aux réseaux de transport, à l’énergie, etc., et le plafond écologique qui met en péril notre maison commune.
Rareté de l’eau et stress hydrique
2,1 milliards de personnes n’ont pas accès à des services d’alimentation domestique en eau potable et 4,5 milliards ne disposent pas des services d’assainissement gérés en toute sécurité. Dans les foyers privés d’eau, on note une inégalité hommes/femmes ; en effet, 80 % des femmes ont la lourde charge d’aller chercher de l’eau pour leur famille. Cette photographie prise à l’instant T par Laura Ballerini, de l’ONG Solidarieta Internazionale, prouve encore l’importance d’éduquer nos jeunes à la citoyenneté mondiale et à l’égalité hommes/femmes. « D’ici 2050, 216 millions de personnes des pays du sud seront amenées à quitter leur pays pour des raisons liées au dérèglement climatique. Même si la migration a toujours existé sous plusieurs formes (crises politiques, migrations religieuses, guerres…), on vit dans un monde liquide, un monde qui bouge. »
Pour Noémie Paté, docteure en sociologie, « il est important de penser notre responsabilité et de refroidir le débat ». Dans ce contexte, les éducateurs lasalliens sont les colibris chers à Pierre Rabhi : ils doivent faire leur part et emmener les jeunes avec eux. Avec optimisme.
Nous avons l’honneur de recevoir actuellement en France la visite du Frère Armin Luistro supérieur général accompagné du Conseil Général de l’Institut basé à Rome. Nommé lors du 46ème chapitre de mai 2022, le frère Armin avait à cœur de faire un tour du monde lasallien et de s’arrêter, avec son conseil dans le pays du fondateur pour y découvrir les réalités de nos missions et de nos communautés.
Le travail que Jean-Baptiste de La Salle réalise avec les premiers Frères, est encore source d’inspiration pédagogique aujourd’hui.
Jean-Baptiste de La Salle fut un novateur en pédagogie. Et surtout il sut rassembler et généraliser les trouvailles de ses devanciers.
Il n’hésite pas à rompre avec des habitudes de son temps.
Certes, quelques attitudes demandent aujourd’hui à être révisées, comme le caractère trop logique et analytique des méthodes, l’insistance sur le silence et sur la gravité, au détriment de la liberté d’expression et d’une saine détente.
Mais d’autres principes restent toujours valables : le caractère global de l’éducation (à la fois chrétienne, intellectuelle, pratique, morale), l’importance des bases que sont la lecture, l’écriture, le calcul, l’usage de la répétition, du contrôle régulier, la participation active et la responsabilisation de l’élève, etc.
La lente évolution du nombre de filles dans les filières scientifiques est un problème de société dans lequel les établissements scolaires peuvent avoir un rôle à jouer. Nombre d’écoles lasalliennes sont conscientes de l’enjeu et mettent en place des stratégies pour arriver à un équilibre.