Formation des formateurs à Thessalonique

Stavroula et Marc, missionnés par le Frère Visiteur pour les écoles lasalliennes de la Grèce, aiment rappeler à leur équipe de formateurs cette assertion souvent citée par le frère Alvaro Rodriguez « Pour que l’école aille bien… ». Citation ajustée à la session de formation de cette fin d’été à Thessalonique : trois jours d’immersion, du 31 au 2 septembre, au collège La Salle, sur les pas de notre fondateur, la conduite des écoles, l’actualisation du message de J.-B. de la Salle notamment par la présentation du parcours d’éducation à la Justice, au service et à l’engagement (PEJ).

Approche historique de l’Institut, résistance de l’église de l’époque, étude des méthodes pédagogiques utilisées par les premiers Frères, extraits de certaines règles appliquées dans les premières écoles pour favoriser la pratique du métier, échanges entre participants, constituent les ingrédients transmis par le Frère Dominique, contenus de formation des futurs cadres des établissements grecs. Une sorte de CLF ressaisi par la génération Z, numérique et mobile, de cette belle terre d’accueil.

Autre apport proposé : les douze vertus d’un bon maître. Une invitation à réfléchir sur les attitudes et les comportements des adultes dont l’ultime vocation est d’accompagner la jeunesse et de l’aider à bien grandir. En complément de cette proposition, le PEJ : un outil pratique sur l’acquisition progressive des valeurs qui fondent la justice sociale. Par la connaissance de douze mots-clefs (bienveillance, confiance, courage, discernement, écoute, fraternité, humilité, liberté, pardon, respect, responsabilité, vérité), la rencontre avec des témoins et des associations, la pratique à l’occasion d’un engagement concret, l’élève réfléchit avec sa classe sur les enjeux d’une société plus juste.

Le débat coopératif, animé par un binôme d’adultes, renouvelé régulièrement, dans différentes disciplines, est le fondement de ce parcours : le jeune s’approprie les valeurs conditionnelles de la dignité de la personne humaine. Par le lien qu’il tisse avec des grands témoins, des personnes impliquées professionnellement ou bénévolement dans des associations choisies pour leur éthique spécifique, la mise en actes, l’agir, l’élève en classe s’humanise. A force de questionnements, d’échanges avec ses pairs, il construit l’homme que nous espérons : celui qui porte un regard émerveillé et humanisant sur la création. Celui qui pour lui-même et pour les autres, pour le monde et pour la croissance spirituelle de tous, va devenir cet homme ‘intègre’ qui change son monde.

Le groupe que Frère Dominique et moi-même avons accompagné pour ce deuxième module est à l’image d’une vraie famille : elle s’embrasse, elle s’aime, se respecte, s’accroche à des idées et parfois sur des idées, se dispute des arguments, se pardonne ses excès, se réconcilie, s’ajuste, puis reconstruit une pensée collective qui dépasse l’entre soi. Elle fait l’expérience du dépassement. Elle s’ouvre à plus grand qu’elle. Cette famille, lasallienne, fait preuve d’une étonnante maturité : Génération Z, son visage a le cœur, le corps et l’esprit de la jeunesse européenne. Elle est forte d’une volonté à toute épreuve. Elle est l’enfance de la crise que ce pays traverse. Et pourtant elle entrevoit déjà un autre monde, un nouveau monde, promesse d’espérance. Elle voit plus loin que nous, assommés que nous sommes par l’immédiat… Pourquoi donc ? Justement parce qu’elle rêve et désire Dieu. Et nous, rêvons-nous encore ?

Pascal Hebbinckuys